Une neuroprothèse inédite permet à un patient tétraplégique équipé d’un exosquelette de se mouvoir / New neuroprosthesis allows a quadriplegic patient with an exoskeleton to move


 

VIDÉO.  

Un exosquelette connecté au cerveau permet à ce patient tétraplégique de marcher / An exoskeleton connected to the brain allows this quadriplegic patient to walk 

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« C'est un message d'espoir pour les personnes dans le même état que moi : il y a des choses possibles, même si on a un gros handicap », explique à l'AFP ce jeune Lyonnais de 28 ans, premier patient d'un essai clinique mené par Clinatec, un centre de recherche biomédicale du CEA, à Grenoble.

Le produit de dix ans de recherche

Le prototype, issu de dix ans de recherches de plusieurs équipes, repose sur des électrodes implantées dans le crâne, qui vont « capter les signaux envoyés par le cerveau et les traduire en signaux moteurs », décrit à l'Agence France-Presse Alim-Louis Benabid, professeur émérite à l'université Grenoble-Alpes.

 

Chez les paralysés des quatre membres suite à une fracture de la colonne vertébrale, « le cerveau est toujours capable de générer les ordres qui habituellement font bouger les bras et les jambes, mais il n'y a personne qui les exécute », poursuit le spécialiste de neurochirurgie, auteur principal d'une étude publiée vendredi dans The Lancet Neurology. Les blessures de la moelle épinière entraînent une tétraplégie (paralysie des quatre membres) chez environ 20 % des patients.

Le cas de Thibault est une « preuve de concept » : les chercheurs ont montré qu'il était possible de capter correctement cette activité électrique de façon continue et de la transmettre quasiment en temps réel et sans fil vers l'ordinateur qui les décode. Mais le chemin est encore long avant de pouvoir utiliser cet exosquelette dans la vie de tous les jours.

« J'ai dû réapprendre petit à petit »

Le jeune homme, à qui on a implanté les électrodes il y a un peu plus de deux ans, s'est entraîné chez lui pendant plusieurs mois sur un simulateur : grâce à son implant, il est parvenu à faire réaliser des mouvements à un avatar virtuel sur l'écran de son téléviseur.

« J'ai dû réapprendre petit à petit. La plasticité cérébrale fait qu'on retrouve les ordres à envoyer pour obtenir les bons mouvements, de manière beaucoup plus souple, beaucoup plus naturelle », explique Thibault, qui était cloué au lit depuis son accident.

 

« Faire avancer la science »

Il s'est ensuite rendu trois jours par mois à Grenoble pour faire les mêmes exercices directement sur l'exosquelette. Résultat : il peut avancer les jambes du robot, plier le coude, lever les épaules…

« Je ne pensais pas qu'on pourrait aller aussi loin », assure-t-il, confiant son « plaisir » à « pouvoir faire avancer la science », en dépit de la fatigue liée à ces entraînements et du chemin restant. « Quand on a eu toutes les douleurs, toutes les souffrances que j'ai pu vivre, je n'ai aucune frustration, ça a toujours été un plaisir de pouvoir participer » à cette recherche.

Améliorer l'équilibre de l'exosquelette

Un autre patient se verra implanter les électrodes en novembre, suivi de deux autres dans les prochains mois, précise le Pr Alim-Louis Benabid.

La suite de l'essai clinique permettra d'acquérir la capacité de saisir un objet avec la main ainsi que d'améliorer l'équilibre de l'exosquelette, le gros point faible de tous les robots de ce type.

« Cela nécessite des calculs très lourds et des temps de réaction très rapides, sur lesquels on est en train de travailler, en utilisant l'intelligence artificielle », explique le chercheur.

 

« Ce n'est pas du transhumanisme »

Dans un premier temps, cette interface pourrait permettre d'ici quelques années aux personnes tétraplégiques de diriger leur fauteuil roulant ou de guider un bras motorisé, qui améliorerait considérablement leur autonomie, espère-t-il.

« Ce n'est pas du transhumanisme : on répond à un problème médical, un corps humain qui a été blessé et qui a des déficits. On est dans l''homme réparé et pas l'homme augmenté », insiste le professeur, renommé notamment pour ses travaux sur la stimulation cérébrale profonde et la maladie de Parkinson.

D'autres équipes de chercheurs ont déjà implanté des électrodes pour stimuler par le cerveau les muscles de patients paralysés ou amputés, un domaine en plein développement appelé « interface neuronale directe » ou « interface cerveau-machine ». Mais l'étude du Pr Alim-Louis Benabid est la première à utiliser directement les signaux du cerveau pour contrôler un robot exosquelette.


"This is a message of hope for people in the same state as me: there are things possible, even if we have a big handicap," says AFP the young 28-year-old Lyonnais, the first patient of a clinical trial conducted by Clinatec, a biomedical research center of the CEA, in Grenoble.


The product of ten years of research


The prototype, the result of ten years of research by several teams, is based on electrodes implanted in the skull, which will "capture the signals sent by the brain and translate them into motor signals", described at Agence France-Presse Alim- Louis Benabid, professor emeritus at Grenoble-Alpes University.

In the paralyzed four limbs following a fracture of the spine, "the brain is still able to generate the orders that usually move the arms and legs, but there is no one who executes," says the specialist of neurosurgery, lead author of a study published Friday in The Lancet Neurology. Injuries to the spinal cord result in quadriplegia (paralysis of the four limbs) in about 20% of patients.

The case of Thibault is a "proof of concept": researchers have shown that it is possible to correctly capture this electrical activity continuously and transmit it virtually in real time and wirelessly to the computer that decodes them. But the road is still long before you can use this exoskeleton in everyday life.
 

 "I had to learn again little by little"


The young man, who was implanted electrodes a little over two years ago, trained at home for several months on a simulator: thanks to his implant, he managed to make movements to an avatar virtual on the screen of his TV.

"I had to learn again little by little. The cerebral plasticity is that we find the orders to send to get the right movements, much more flexible, much more natural, "says Thibault, who was bedridden since his accident.

"Advancing science"


He then went three days a month to Grenoble to do the same exercises directly on the exoskeleton. Result: he can advance the legs of the robot, bend the elbow, lift the shoulders ...

"I did not think we could go that far," he says, confiding his "pleasure" to "being able to advance science", despite the fatigue associated with these practices and the remaining path. "When we had all the pains, all the sufferings that I could live, I have no frustration, it has always been a pleasure to be able to participate" in this research.
  


 Improve the balance of the exoskeleton

Another patient will be implanted electrodes in November, followed by two more in the coming months, says Professor Alim-Louis Benabid.

Following the clinical trial will acquire the ability to grasp an object with the hand and improve the balance of the exoskeleton, the big weak point of all robots of this type.

"This requires very heavy calculations and very fast reaction times, which we are working on, using artificial intelligence," explains the researcher.
 

 "It's not transhumanism"  

 As a first step, this interface could enable quadriplegic people to direct their wheelchairs or guide a motorized arm in a few years, which would considerably improve their autonomy, he hopes.

"This is not transhumanism: we are responding to a medical problem, a human body that has been injured and has deficits. We are in the "repaired man and not the man increased," insists the professor, renowned for his work on deep brain stimulation and Parkinson's disease.

Other teams of researchers have already implanted electrodes to stimulate the muscles of paralyzed or amputated patients through the brain, a field in full development called "direct neural interface" or "brain-machine interface". But Professor Alim-Louis Benabid's study is the first to directly use brain signals to control an exoskeleton robot.


https://www.thelancet.com/journals/laneur/article/PIIS1474-4422(19)30321-7/fulltext